Auteur : Philippe Natalini, l’enquêteur de Section de recherche en
Gendarmerie , devenu romancier pour raconter le débarquement de Provence
Ne surtout pas oublier !..
Il y a 78 ans jour pour jour, avait lieu la terrible rafle des Juifs du 25 octobre 1943 de Clans (06), petit village de l’arrière pays niçois.
À cette époque, 70 Juifs sont réfugiés à Clans où ils y ont été parfaitement accueillis par les habitants à la tête desquels œuvre le maire Paul Isoart ainsi que son épouse Edwige.
Cette population était organisée de sorte de prévenir les 70 réfugiés des lors qu’une opération de soldats allemands était signalée, et ce afin qu’ils aient le temps de se cacher avant leur arrivée au village.
En effet, la route d’accès au village avec sa route en lacets était assez facile à surveiller. Paul Isoart, affilié à la Résistance locale, surveillait la route adjacente à l’usine EDF de Bancairon.
En cas de danger, il prévenait le cafetier du Pont de Clans qui avertissait à son tour Edwige Isoart, receveuse des PTT. Le message transmis par téléphone, très simple « le lait monte », signifiait qu’il y avait une visite de la Gestapo.
Ce stratagème permettait aux réfugiés juifs de se mettre à l’abri avec la complicité active des habitants.
Malheureusement, quelques fausses alertes rendirent tout le monde moins vigilant.Ainsi, le lundi 25 octobre 1943, les Allemands arrivèrent brusquement à Clans, sans que personne n’ait pu être averti.
Lors de cette rafle ordonnée et organisée par le terrible chef des S.S. sur Nice, Aloïs Brünner, 27 réfugiés furent arrêtés et déportés dans le camp d’extermination d’Auschwitz II Birkenau, tandis qu’une trentaine parvenaient à se cacher.
Les 27 malheureux arrêtés seront déportés sans retour, à l’exception de Henry Bily, le seul qui survivra aux camps.
Celui-ci écrira un livre retraçant son parcours et l’ignominie des camps d’extermination.
La police allemande, rendue furieuse par cet échec partiel, traîna Edwige Isoart sur la place du village, sous la menace d’un revolver, mais elle parvint à se disculper et ne fut pas arrêtée grâce et par chance, une voisine mariée à un Allemand témoigna en leur faveur et ils furent remis en liberté.
Sans se laisser décourager et au mépris du danger, ils continuèrent à prévenir les Juifs pendant tout l’hiver 1943/1944, sauvant ainsi nombre d’entre eux de l’arrestation et de la déportation.
Le 8 mars 1987, l’Institut Yad Vashem de Jérusalem a décerné à Edwige et Paul Isoart le titre de Juste parmi les Nations.
Yad Vashem – Institut international pour la mémoire de la Shoah | www.yadvashem.org |
Paul Isoart, maire de Clans (06) et son épouse Edwige, ont obtenu la médaille des Justes.
En 1993, une plaque commémorant le cinquantième anniversaire de la rafle a été apposée sur le mur de la mairie.
De cet épisode funeste, seul Bily Henry, raflé par les Nazis, revint après deux ans de déportation.
Médaillé de la Résistance, Il retourne à Clans sur les traces de son passé dans un reportage du 23 janvier 2000 réalisé par Nathalie Jourdan, Richard De Silvestro et Charles Vatinel, archivé en ligne :
Aloïs Brunner, responsable de la rafle à Clans, né en 1912, est accusé d’avoir envoyé 128 500 juifs vers les camps d’extermination.
Il a notamment été le responsable du camp de Drancy en région parisienne, se rendant responsable de la déportation de 24 000 juifs français ou résidents en France en direction des camps de la mort.
Aloïs Brunner a été condamné à mort par contumace par le tribunal permanent des forces armées à Paris en 1954.
En 2001, la cour d’assises de Paris l’a de nouveau condamné à perpétuité pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité.
Selon de nombreuses sources, Aloïs Brunner se serait enfui dans les années cinquante en Syrie où il était connu sous le nom de « Georg Fischer ».
Après des décennies de traque, le centre Simon Wiesenthal, qui traque les criminels nazis, a décidé de ne plus rechercher Aloïs Brunner, l’ancien bras droit d’Adolf Eichmann, le principal responsable de la mise en œuvre de la « solution finale » durant la Seconde Guerre mondiale.